Aller au contenu principal

Comme nous l’avons vu précédemment, cette salle était destinée à l’accueil des invités et aux repas festifs. C’était la «salle de représentation» de la maison.

Ce qui frappe d’emblée, c’est la vaste cheminée de bois peinte en faux-marbre. Elle est surmontée d’un trumeau réalisé sans doute par le même stucateur que pour la console au dessus de la porte du «poêle». On y observe un décor d’inspiration Louis XIV comprenant des pampres et des merles aux yeux formés d’un éclat de charbon de bois (seul exemple repéré à ce jour).

Dans la région, de tels décors étaient présents dans les logis cossus : presbytères, maisons seigneuriales et bourgeoises, grosses fermes..., malheureusement leur fragilité a souvent entraîné leur disparition. L’ancienne maison Remacle à Ortho, déjà citée, possédait également un trumeau stuqué, quoique assez différent (en forme de soleil rayonnant), dans sa «belle salle»1.

Précisons qu'il existait deux types de décors stuqués : des décors « de luxe » réalisés par de véritables sculpteurs itinérants, souvent d’origine italienne comme les Moretti, qui travaillaient véritablement le stuc à main levée, et des décors plus courants, œuvres de simples plafonneurs qui recouraient à des moules et des gabarits, comme c'est le cas ici.  Cette compétence limitée explique leur fidélité à des motifs d'inspiration Louis XIV jusque tard dans le XVIIIe siècle (le style rocaille était trop compliqué pour eux)2. Reconnaissons cependant que la combinaison de ces motifs classiques avec des éléments d'inspiration plus populaire comme les oiseaux et les pampres est très réussie.

Le fond de la cheminée est orné d’une taque à l’aigle bicéphale provenant du château de Bassines (Méan), ancienne propriété des comtes van den Steen de Jehay, démoli en 1984. La présence de cet emblème héraldique des Habsbourg rappelle leur souveraineté sur le duché de Luxembourg du XVe siècle à la Révolution.

Le plafond : il a été réalisé en 2016. Si l’on ignore tout du plafond ancien qui avait disparu, certains vestiges ont cependant permis à M. Daniel Menchior (Atelier Menchior à Ans) d’en reconstituer la corniche périphérique selon le profil en usage à l’époque. Cette partie-là a donc été refaite sur base de traces archéologiques et doit être très proche de l’originale.

Il n’en va pas de même pour les moulures du plafond proprement dit dont aucune trace ne subsistait, le plafond ayant été entièrement refait en plaques de plâtre durant le XXe siècle. Etait-il lisse ou orné ? Nous n’en savons rien. La décision de créer un nouveau plafond en harmonie avec le trumeau et la corniche se discute donc mais n’est pas totalement dénuée de fondement : des fragments d’un plafond mouluré figurent sur les photos de la maison Remacle (déjà citée) prises par l’IRPA durant la guerre 1940-45 ; d’autres plafonds moulurés sont connus dans la région, comme celui de l’ancienne maison Scheurette à Gouvy, très travaillé, mais aussi celui de l’ancienne maison du Prévôt à Houffalize, celui de l’ancien hôtel du Luxembourg… Ces deux derniers ont disparu dans les bombardements de la dernière guerre3.

La restauration du trumeau stuqué de la cheminée a été réalisée par l’atelier ARTBEE, de Liège. Il a d’abord fallu retirer, au scalpel et par décapage chimique, pas moins de huit couches de peinture de couleurs diverses ! Inutile de dire que le décor d’origine était devenu à peine reconnaissable. Le faux marbre de la cheminée a également dû être dégagé et restauré par le même atelier.

Le placard sous la fenêtre est d’origine. Il s’inscrit dans une moulure à gorge, caractéristique du XVIIIe siècle, qui fait le tour de la baie (on a pu observer la même dans le « poêle »). Il est possible qu'initialement, cette moulure ait encadré un dispositif complet comprenant des volets intérieurs.

Dans le fond de ce placard, on a retrouvé une planche portant gravée une date : 1767. Cette planche paraît avoir été réutilisée mais témoigne, par cela même, d’un désir de conserver la date d’achèvement de la maison. C'est la seule date relevée, elle est confortée par la présence de la maison sur la carte de Ferraris (1774).

Notes et références

  • 1

    KIK-IRPA, cliché A091618, état en 1945.

  • 2

    Ouvrage collectif sous la coordination de Nathalie de HARLEZ de DEULIN, Décors intérieurs en Wallonie, Ed. Luc Pire, Liège, 2003, tome 1, p 211. 

  • 3

    COMITE PROVINCIAL DE SECOURS ET D’ALIMENTATION DU LUXEMBOURG, SECTION « ARCHITECTURE », « La Province de Luxembourg, Architecture et Décoration », Ed. Nels, Bruxelles, 1917, Volume IV, planches 12 et 22.